C’est presque porno de tenter d’écrire quoi que ce soit ici. Et de partager un lien qui impose, ne serait-ce que cinq secondes durant, une publicité merdique pour les pâtes Barilla ou je ne sais quoi, des deals de fou chez Boulanger ou Fly.
Mais on le fait quand même. Parce que c’est excitant, comme louvoyer entre les rangées de carottes, dans les petits potagers, on se dit fais-pas le con. Et de telles victoires sur l’instabilité et le gâchis alimentaire valent leur pesant d’or.
L’eau qui dort du trio de Richmond m’a émancipé des cons et des ficelles qu’ils tiraient sans cesse dans mon dos, au creux de mes coudes, jusque dans le bulbe rachidien. M’a fait marcher bien droit dans le droit chemin. C’était la messe basse qui guérit, le chut,chut, t’inquiète d’un compagnon plus savant.
Je fixais la rue Gaston Célarié, le visage criblé de lumière dentelée ; la porte roulante du garage où logeait une famille, dans ce qui ne semblait pas plus grand que la cahute d’accueil d’un Carglass. Les trois post-rockers taiseux m’ont remplacé et réparé, aussi.
Samedi soir avec deux amis, j’ai réécouté ce morceau tant chéri, sans mot dire. Il m’a aidé à graver le moment dans l’éternité. Comme une minuscule chapelle ardente.
Dans un vieil article des Inrocks, l’un des trois gourous calmes révélait : « On s’est habitués à entendre les gens qui parlent et le bruit des verres pendant que l’on joue. Cela fait presque partie intégrante de nos concerts. Lorsque nous avons débuté en duo, Mark et moi, nos sets étaient des sortes de performances bruitistes, alors qu’aujourd’hui on assume totalement la discrétion et la lenteur de notre musique. De toute façon, on est trop bien éduqués pour prier les importuns de la fermer. Et puis si j’aperçois comme ce soir seulement deux personnes au premier rang qui écoutent les yeux fermés, alors je me dis qu’on aura servi à quelque chose. »
Amen.